Grosses infiltrations par un mur creux

  •  Un immeuble dont la façade principale est exposée au Sud-Ouest.
  • Énormes infiltrations d'eau principalement sous la façade en retrait du second étage au niveau de la terrasse.
  • Recherche des infiltrations par colorants et pas sondages.
  • Je montre en bas de l'article une coupe détaillée du mur litigieux dessinée avant les sondages, ainsi que le trajet des eaux s'infiltrant derrière le parement en briques
  • Finalement, l'hypothèse émise d'infiltrations via le parement en briques était bonne.
  • Pour 6 l/min d'eau chassée par le vent sur une parement en briques, la moitié pénètre dans le mur et ruisselle à l'intérieur, soit 3 l/min, soit ici ±40 L dans toute la façade du second étage.

Exposé

  •  On observe une étrange arrivée d'eau au plafond du deuxième étage à gauche en dessous du toit à la jonction de l'arrière linteau avec les hourdis, le tout formant une poutre en L inversé.
  • On constate que tout le long d'une poutrelle entre 1er et 2ème étage, poutrelle supportant la façade en retrait du second étage, il y a de nombreuses infiltrations aussi bien devant que derrière la poutrelle.
  • Il y a même un ruissellement d'eau tel dans le coin à droite que le plafonnage frais a été raviné !
  • Cette arrivée d'eau importante provoque de l'autre côté du mur intérieur une tache humide de 1 m2 environ.
  • D'où viennent ces infiltrations ?

Constat

Les photos ci dessous montrent les recherches entreprises pour localiser les sources possibles d'infiltrations.

  • Aucune infiltration de colorant n'est constatée à droite derrière le couvre mur en pierre.
  • Par contre, à gauche, au droit du seuil, la bavette de roofing en S a été coupée.
  • La partie derrière le seuil a aussi été coupée et descend vers une feuille Diba posée horizontalement en dessous du roofing sous le seuil et sous le bloc intérieur mis à plat pour soutenir le châssis.
  • Entre le seuil et le bloc est coincé un isolant rigide de 2 cm qui s'enfonce dans le Diba et accentue une forme de gouttière dans le Diba.
  • Cette gouttière débouche en pente sous la bavette en S du mur creux. Tout le colorant déversé part par là !

Commentaires

 Le résultat ne s'est pas fait attendre :

  • le colorant commence à se déverser dans le coin raviné du plafonnage et progressivement tout le long de la poutrelle, c.-à-d. le même chemin que l'eau qui s'infiltrait auparavant sous le châssis coulissant dépourvu d'un joint d'étanchéité sur le seuil.
  • De plus, derrière la batée du coulissant, on s'aperçoit que le fond de joint en mousse est détaché du châssis : il ne subsiste donc verticalement qu'un mince joint de mortier contre un châssis en aluminium pour assurer une étanchéité derrière la batée.
  • Il est évident que le vent dominant du Sud-Ouest chasse les eaux de pluie à travers ce joint.
  • L'eau ruisselle jusqu'en bas et tombe de la bavette en S pour arriver en roue libre dans le creux via le Diba sous le seuil.
  • De là, l'eau peut tomber sur toute la poutrelle qui est une trentaine de cm plus bas et se répandre tout le long de celle-ci.

Conclusions

  • Il y avait donc un défaut d'exécution à la jonction entre le roofing en L sous le seuil et le roofing en S dans le creux voisin.
  • Y avait-il moyen de ne pas couper cette jonction, alors que la membrane doit se positionner sur deux plans verticaux différents : le seuil d'un côté, le bloc intérieur de l'autre derrière les panneaux d'isolation ?
  • L'obligation de couper les ponts thermiques avec des isolants placés verticalement derrière le seuil sous les châssis rend la tâche des maçons de plus en plus compliquée !
  • De plus, le joint sous les coulissants n'est fait que depuis 3 semaines. Pourquoi n'intercale-t-on pas sous les châssis un joint COMPRIBAND au moment de la pose? Et tant qu'on a ce rouleau de COMPRIBAND, il faut le mettre comme fond de joint derrière les battées en choisissant un coefficient de compression adéquat.

En bleu, le trajet de l'eau; en rouge, les barrières ou bavettes en S.


Les arrivées de colorant à l'intérieur de l'immeuble

Il a suffi de quelques minutes seulement pour que le colorant arrive aux mêmes endroits que les infiltrations constatées au début. CQFD.

Mon conseil

La réalisation des bavettes en S à la base des murs creux à la jonction avec les étanchéités extérieures des terrasses est toujours délicate à concevoir et à exécuter !

  1. La conception :
    1. Faire une coupe verticale dans le seuil et le linteau au dessus est bien, mais cela ne suffit pas.
    2. Il faut en effet réfléchir aussi à la jonction horizontale qui doit se faire au droit des battées soit au même niveau avec la bavette en S normale qui se prolonge, soit par déversement dans le creux vers une autre bavette située plus bas au pied de la façade.
    3. Comment peut-on parvenir à soutenir aussi et en même temps un châssis qui, dans ce cas précis, pèse plus de 400 Kg?
    4. Les détails de conception doivent donc être multi directionnels, presque en 3 D pour bien faire comprendre les endroits de jonction, de remontée, derrière quoi, avec ou sans isolation, etc.
  2. L'exécution :
    1. Le maçon doit comprendre parfaitement les détails d'exécution de l'architecte.
    2. Et il doit les mettre en œuvre avec soin en veillant à une continuité totale de la bavette en S derrière le seuil et derrière les briques de parement.
    3. Et il est évident, surtout en hiver, qu'on ne plie pas une membrane de roofing comme une feuille de papier ou comme le dessine le concepteur sur sa table à dessin.
  3. Le contrôle des travaux : s'agissant d'une phase délicate des travaux, l'architecte devrait passer voir l'exécution avant que tout soit fermé.
  4. Les matériaux :
    1. Le roofing normal ne convient pas très bien, à mon avis, pour ces réalisations. Je conseille donc le roofing spécial vendu par PIMPURNIAUX qui est plus fin et plus maniable surtout en hiver. Avantage du roofing, il peut se souder très facilement et s'amollir à la flamme pour prendre une forme de cuvette par exemple ou pour arrêter la bavette par un relevé latéral. Le roofing est totalement étanche y compris au contact du mortier, briques, etc. Pincé entre deux matériaux durs, il n'est pas capillaire. Il est extrêmement durable.
    2. Le DIBA est à éviter, je dirais même à proscrire. En effet, le collage est très difficile et couteux; personne ne le fait. Le plier n'est pas très facile non plus ! Et enfin, son inconvénient majeur est qu'il favorise les entrées d'eau par capillarité. Il se dégrade sous les UV.
    3. Je conseille aussi vivement le COMPRIBAND qui est un joint au bitume autocollant sur 1 ou sur 2 faces, comprimé, très expansible, et qui sert de joint d'étanchéité sous le châssis, mais également de fond de joint étanche entre le châssis et les battées. On le colle au châssis sur tout le périmètre avant de poser ce dernier et le tour est joué. Le joint va se décomprimer progressivement et pourra servir de joint étanche, même si le resserrage n'est pas encore fait.

© 2015 - Jean GLAUDE, ingénieur civil architecte